Se porter volontaire pour mettre fin à la violence

Récits

Women holding signs

Par Sarah Pentlow
Coordonnatrice mondiale, Égalité homme-femme et inclusion sociale

En 2017, le mouvement féministe a connu un nouvel essor avec la Women’s March à Washington DC, le lancement de Politique d’aide internationale féministe du Canada et la récente campagne #moiaussi, qui a porté notre attention sur le nombre élevé de cas de harcèlement sexuel et d’agressions sexuelles. Si ces événements ont permis de générer de l’intérêt pour la défense des droits des femmes, ils se sont malheureusement accompagnés d’un nombre croissant de témoignages de racisme, de xénophobie et de violence dans les médias. Une triste réalité que l’on constate partout sur la planète et qui pousse à se demander si l’humanité progresse réellement.

Encore à notre époque, le patriarcat est le paradigme tout puissant qui sous-tend notre tissu social et qui justifie la violence comme mode de vie. Nous devons, si nous voulons améliorer concrètement la vie des femmes partout dans le monde, faire un virage culturel et systémique majeur, et ce, tant à l’échelle individuelle, collective, familiale que mondiale. Ce n’est pas une mince affaire, il faut se le dire! Il est donc légitime de se demander par où commencer… C’est simple : faire du bénévolat et de la coopération volontaire!

À l’école, quand votre enseignante disait « j’ai besoin de trois volontaires », étiez-vous de ceux qui levaient leur main ou de ceux qui détournaient le regard? Une recherche démontre que le fait de se porter volontaire et de faire du bénévolat favorise des comportements prosociaux. En d’autres mots, les personnes qui font du bénévolat sont plus susceptibles de développer leur empathie et moins susceptibles de développer des comportements destructeurs (ce qui explique pourquoi bien des écoles ont rendu le bénévolat obligatoire à l’obtention du diplôme). Au Canada comme ailleurs dans le monde, le mouvement pour mettre fin à la violence faite aux femmes est né grâce au travail acharné de nombreuses bénévoles. Encore aujourd’hui, les groupes communautaires comptent plus que jamais sur ces bénévoles, notamment en raison de leurs ressources financières limitées. Comme le révèle une étude sur le personnel des groupes de lutte contre la violence, seulement le quart de ces fournisseurs de services sont rémunérés pour leur travail. En fait, une simple recherche sur Google donne un bon aperçu du rôle crucial que jouent les bénévoles dans cette mission.

Tout le monde n’a pas le temps de faire du bénévolat dans un groupe communautaire, bien sûr. Toutefois, nous pouvons tous, et devrions tous, faire notre part pour mettre fin à la violence dans notre sphère d’influence personnelle, que ce soit en apprenant à nos enfants la différence entre un comportement acceptable ou inacceptable ou en dénonçant le sexisme, le racisme et tous les autres « ismes » subis en milieu de travail, par exemple. Évidemment, nous pouvons aussi passer à un autre niveau en faisant du bénévolat dans notre communauté ou de la coopération internationale à l’étranger.

Attention, il ne s’agit pas d’envoyer des Canadiens bien nantis dans des pays « pauvres et sous-développés » pour « sortir les gens de la pauvreté ». Pas plus qu’il ne s’agit d’organiser des voyages de tourisme humanitaire ou d’envoyer des jeunes non qualifiées comme main-d’œuvre gratuite. C’est de solidarité dans sa forme la plus pure dont il est question ici. Je travaille pour Cuso International depuis plus de 10 ans, et c’est la capacité de la coopération volontaire à générer des changements sociaux que je constate jour après jour qui me motive à continuer. Des coopérants-volontaires provenant d’horizons divers travaillent main dans la main avec les populations locales pour apporter des changements positifs dans leurs communautés. De plus, l’expérience sur le terrain des coopérants-volontaires les amène à réfléchir aux notions de pouvoir et de privilège et à utiliser le fruit de ces questionnements pour obtenir des résultats équitables.

Plus j’entends des témoignages de gens dont les relations et la vie ont été transformées par ces échanges, plus je sens l’espoir renaître en moi. Comme ce fonctionnaire bolivien qui, après avoir participé à un atelier sur les masculinités positives s’est engagé à devenir un meilleur père ou comme cette avocate canadienne qui a poursuivi un partenariat entre son organisation vancouvéroise et le Dawei Pro-Bono Lawyer’s Network, après son affectation au Myanmar (Birmanie). La coopération volontaire offre un espace qui favorise les rencontres, la collaboration entre personnes de cultures différentes et la remise en question de nos visions du monde. Elle permet également de réaliser que les difficultés rencontrées dans les pays loin de nous, leurs luttes pour une plus grande justice sociale et leur peur de la violence ne diffèrent pas des nôtres.

Que ce soit au Canada ou ailleurs dans le monde, c’est dans nos interactions quotidiennes — écouter nos collègues, faire confiance à nos voisins, appeler nos amis et promouvoir la paix — que prend naissance le changement. C’est ce qui donnera l’impulsion nécessaire pour modifier les normes sociales, les politiques et les lois et mettre fin à la violence. Et tout ça commence par une main qui se lève pour se porter volontaire.