Entrevue avec David Forest, directeur des programmes pour l’Afrique

Récits

Family wearing face masks

David Forest est directeur des programmes de Cuso International en Afrique. En septembre 2019, il a quitté Ottawa pour s’installer au Bénin avec sa conjointe et leurs deux jeunes enfants. La petite famille a été obligée de revenir plus tôt en raison de la pandémie de COVID-19. Le coronavirus s’étant rapidement propagé en Europe et en Amérique du Nord, le gouvernement canadien a pressé ses ressortissants à revenir au pays. David a gentiment accepté de faire une entrevue téléphonique avec nous pour nous parler de l’impact du coronavirus sur son travail.

Question : Peux-tu nous parler de ta vie au Bénin avant de recevoir la directive de revenir au Canada?

Réponse : Bien sûr! Nous suivons les nouvelles d’Europe et du Canada, mais tout ça nous paraissait bien loin vu de l’Afrique et du Bénin. Quand nous avons pris la décision de quitter le Bénin, nous commencions à constater les conséquences du coronavirus : la peur, le stress, la fermeture des restaurants et des entreprises, la fermeture des écoles, les gens portant des masques.

Lors de mon premier contact avec l’ambassade canadienne, j’avais eu l’impression que nous n’étions pas tenus de revenir au Canada. Mais trois jours plus tard, l’ambassade nous a appelés pour nous dire que nous serions évacués. Ce fut tout un choc pour nous. Les choses avaient tellement changé en quelques jours.

Nous n’étions pas sûrs que c’était le bon moment de partir. Nous ne voulions pas partir trop tôt parce que nous voulions remplir notre mission. En même temps, nous ne voulions pas attendre trop longtemps et nous retrouver dans l’impossibilité de partir en raison de la suspension des vols et de la fermeture des frontières. Je ne voulais pas mettre ma famille en danger. En fait, nous espérons pouvoir retourner au Bénin un jour ou l’autre.

Q : Que s’est-il passé lorsque la décision de revenir au pays a été prise?

R : Nous avions environ une semaine pour réunir nos effets personnels. Ce fut intense! Surtout avec la pression liée à la gestion de crise et à l’école à la maison, qui s’ajoutait à ma tâche habituelle. En plus, nous n’étions pas certains de pouvoir trouver un vol.

Nous avons quitté Cotonou très tôt le matin, le jeudi 2 avril, avec une escale à Paris. Nous avons pris un vol vers Montréal le lendemain. C’était un peu surréaliste. L’aéroport Charles de Gaulle, à Paris, est une plaque tournante en Europe. Mais il était vide! C’était vraiment très bizarre. Même dans l’avion, nous n’étions qu’une vingtaine de personnes.

Q : Que s’est-il passé pour le personnel de Cuso International qui travaillait avec toi au Bénin?

R : Au Bénin, les employés restent à la maison. Ils assurent une rotation au bureau. Nous avions plusieurs projets dans le Nord du pays. Nous avons finalement décidé de les poursuivre en adoptant des mesures de prévention, comme le port du masque, le lavage des mains et la distanciation physique.

Les mesures de confinement en place en Europe et en Amérique du Nord sont difficiles à appliquer au Bénin. Ils ont confiné deux ou trois régions où des cas de COVID-19 ont été répertoriés, dont Cotonou, pour empêcher les gens d’en sortir. Mais il n’y a pas de mesures strictes comme celles appliquées ici. Même si bien des entreprises sont fermées et que les gens portent des masques, il est très difficile de demander aux gens de rester à la maison en Afrique, étant donné la densité de population et la façon dont les maisons sont construites.

En République démocratique du Congo (RDC), les employés travaillent de la maison. Les mesures gouvernementales leur interdisent de se rendre au bureau. Le confinement y est très strict. En Éthiopie, nous avons mis en place un système de rotation.

Aucun de nos bureaux ne fonctionne comme à l’accoutumée. Soit les gens font du télétravail, soit ils vont au bureau à tour de rôle si c’est absolument nécessaire.

Q : Quel message voudrais-tu transmettre aux employés et aux coopérants-volontaires qui ont été affectés par tout ça?

R : Notre travail demeure crucial, même s’il a été interrompu et, dans certains cas, suspendu. Tous les enjeux qui nous préoccupent et que nous essayons de régler en collaboration avec nos partenaires restent pertinents. En fait, ils méritent plus que jamais notre attention. Nous parviendrons à passer à travers et continuerons à avoir un impact positif sur le terrain.