NOUVELLES DE LA RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO (RDC)

Actualités

Woman holding a baby

Le 27 mars dernier, les membres de l’Union Nationale des Accoucheurs et Accoucheuses du Congo (UNAAC), réunis en assemblée générale ont adopté les nouveaux statuts de l’organisation, changeant du même coup la dénomination de  l’association, laquelle peut maintenant être appelée « Société Congolaise de la pratique Sage-Femme (SCOSAF) »

Il est intéressant de rappeler le parcours historique de cette association pour mesurer l’importance de cet événement, histoire que l’on peut débuter à la période coloniale puisque c’est à cette époque que, sous l’influence belge, commence à se définir cette profession au Congo. Les accoucheuses belges étaient alors accompagnées d’aides-accoucheuses congolaises ayant reçu une initiation de tout juste 9 mois pour les préparer à leur rôle. En 1960, au moment de l’Indépendance, l’ouverture des Instituts Techniques Médicaux lance la formation d’accoucheuse auxiliaire, d’une durée de 2 ans, une formation qui pré-suppose que les candidats ont terminé leur primaire et 2 années de secondaire. Il faut attendre le début des années 1970 pour que le Ministère de l’Enseignement Supérieur et Universitaire crée la filière accoucheuse (Bac + 3 ans) au sein de l’Institut Supérieur des Techniques Médicales de Kinshasa (ISTM). Cette filière fonctionne alors comme une option dans la section des Sciences-Infirmières. Le rattachement de cette formation au département des Sciences Infirmières a fait en sorte que sur le terrain, il n’y ait pas eu une nette démarcation entre ces professions et que sur le plan associatif, les deux catégories ont évolué au sein d’une même association jusqu’en l’an 2000, année au cours de laquelle un groupe d’accoucheurs et accoucheuses avec à sa tête Samukungu Mawanga Samy décide de former une association autonome et indépendante. C’est ainsi que l’UNAAC a vu le jour et qu’une année plus tard, en 2001, l’organisation se dotait d’une personnalité juridique, avec la reconnaissance formelle de la catégorie professionnelle d’accoucheur/euse sur le plan de la législation congolaise.

Ce qu’il faut retenir de la période qui s’est échelonnée entre 2001 et 2011 ce sont les défis et difficultés auxquels a dû faire face l’UNAAC afin d’avancer dans son développement organisationnel. Le nombre réduit de membres, la forte influence de l’association des infirmiers sur des membres potentiels de l’UNAAC, l’inexpérience de l’équipe de gestion, et le manque de partenaires techniques et financiers expliquent les tâtonnements et les difficultés de ces années. C’est la détermination du leadership de l’UNAAC qui permet à l’organisation de traverser cette phase difficile et incertaine.

Pendant cette période, la santé maternelle est déjà depuis plusieurs années une priorité des organisations internationales. L’initiative pour une maternité sans risques (Safe Motherhood Initiative) date du début des années 1990. Il faut cependant attendre le rapport sur la pratique sage-femme dans le monde, publié en 2011 sous la coordination du FNUAP, pour que les associations de sages-femmes deviennent des interlocuteurs incontournables des agences de développement et des gouvernements. Au cœur de la stratégie adoptée par le FNUAP à la suite du rapport, se trouve la conviction que la réduction de la mortalité maternelle et néonatale passe nécessairement par le renforcement de la pratique sage-femme dans le monde. Cette même année, le FNUAP en RDC décide d’appuyer techniquement et financièrement une évaluation de la formation d’accoucheuse au Congo qui conclut que celle-ci est plus théorique que pratique, que les enseignants qualifiés sont en nombre insuffisant et que la formation ne répond ni aux normes et standards internationaux, ni aux besoins de la population. Le Ministère de l’Enseignement Supérieur et Universitaire prend alors la décision de réformer le programme de formation et d’adopter la dénomination internationale de la sage-femme pour qualifier les professionnels. La réforme abouti en 2013 avec la mise en place de la formation « sage-femme » avec entrée directe et un curriculum répondant aux normes et standards de la Confédération Internationale des Sages-Femmes (ICM).

Le vent de réforme gagne la direction de l’UNAAC qui commence à ressentir le besoin de réviser ses statuts et adopter également la dénomination de sage-femme. La rencontre entre l’UNAAC et Cuso International arrive à point nommé, et au printemps 2015, les organisations formalisent leur volonté de collaborer ensemble dans le cadre du projet VOICE qui vise à renforcer les capacités de partenaires par le biais de la participation de volontaires professionnels canadiens. Didier Muamba Kabeya, avocat originaire du Congo et canadien d’adoption, est le premier coopérant volontaire envoyé par Cuso International, pour aider l’UNAAC à mettre son projet de réforme sur les rails. Pendant son séjour à Kinshasa, Didier travaille avec la direction de l’UNAAC sur la production d’un diagnostic organisationnel qui incite l’association à se doter d’un plan stratégique. Un des objectifs principaux de ce plan est la refonte des documents normatifs de l’organisation (statuts et règlements internes) et l’adoption de la nouvelle dénomination de Société Congolaise de la pratique Sage-Femme (SCOSAF). Claudine Muaka, la deuxième coopérante volontaire envoyée par Cuso International pour soutenir les efforts de l’UNAAC, prend le relais, poursuivant le travail initié par Didier. Pendant son mandat, elle soutient l’association dans la mise en forme des différents documents requis pour concrétiser la transformation de l’UNAAC.

En 2016, l’approbation du projet «  Les sages-femmes sauvent des vies » permet à l’UNAAC de renouveler le support de Cuso International à travers un nouveau partenariat tripartite, réunissant l’UNAAC, Cuso International et l’Association Canadienne des Sages-Femmes (ACSF). Avec le support opportun de ces partenaires l’UNAAC entame la phase décisive du processus de réglementation de l’association, celle validera les nouveaux statuts et règlements, ainsi que le projet de loi qui régira la création et le fonctionnement de l’ordre des sages-femmes de la RDC. Grâce au projet MSL dont l’objectif est de renforcer les associations de sages-femmes dans 4 pays (Bénin, Éthiopie, RDC et Tanzanie) afin qu’elles puissent contribuer aux efforts de réduction de la mortalité maternelle et néonatale dans leurs pays, l’UNAAC reçoit l’appui de consultantes expertes membres de l’ACSF, qui travaillent avec le comité ad-hoc constitué par l’UNAAC, et poursuivent le travail des volontaires Cuso International afin de parfaire la documentation et les outils nécessaires au changement des statuts. Ce travail est effectué lors de réunions face à face, alors que les expertes viennent en mission à Kinshasa, et se poursuit à distance via l’internet. La plateforme mise en place pour faciliter les échanges fonctionne puisqu’au bout de trois mois, le 29 mars dernier, le dernier format des documents produits est soumis à l’assemblée générale de l’UNAAC. Les représentants présents adoptent les nouveaux statuts et reconnaissent la nouvelle dénomination de leur association.

L’histoire ne s’arrête pas là puisqu’une deuxième assemblée extraordinaire a été convoquée pour la semaine du 8 mai prochain, lors de laquelle il sera question du projet de loi pour la création et le fonctionnement de l’ordre de la sage-femme. Les consultantes de l’ACSF poursuivront d’ailleurs leur travail en soutenant la SCOSAF dans son plaidoyer auprès du gouvernement concernant le projet de loi.

À la veille du Congrès triannuel de la Confédération Internationale de Sages-Femmes qui se déroulera en juin à Toronto (18-22), l’ACSF et Cuso International tenaient à joindre leurs voix pour célébrer cette victoire significative de la SCOSAF, et réitérer leur volonté de poursuivre cette enrichissante collaboration !